Le rapport Grignon (du nom du sénateur UMP qui le présente) vient de paraître il est question dans celui-ci de la libéralisation des TER, c’est à dire de confier à des entreprises privées le transport ferroviaire régional de voyageurs. Ce but porté par la droite et la gauche libérale depuis plus de 10 ans se précise désormais à l’horizon 2018 comme le précise cet article de la Gazette des comunes. Voir pièce jointe : Article de la gazette des communes mai 2011 : la libéralisation des TER.
Brève histoire du transport public ferroviaire de voyageurs :
- De l’ébauche à l’essor du train :
Les premières lignes de train au XIXème siècle étaient toutes concédées à des entreprises privées. Chaque compagnie avait le monopole sur son réseau. Les compagnies se partageaient ainsi le territoire (Compagnie de Paris-Lyon-Méditerranée, Compagnie d’Orléans, Compagnie du Midi, Compagnie du Nord, Compagnie de l’Est, Compagnie de l’Ouest) elles étaient largement subventionnées pour la construction des lignes et leur exploitation. Les réseaux peu profitables sont très vite nationalisés au sein de l’Administration des Chemins de Fer de l’Etat dès 1878.
L’absence de transport routier sur l’ensemble du territoire est à l’origine de l’essor du transport ferroviaire, le réseau se développe énormément, il faut imaginer que la capillarité du réseau ferré en 1921 était à peu près identique à celui des routes départementales actuelles !
- Une crise de surproduction du capitalisme : les fermetures de lignes
Outre les destructions causées par les 2 guerres mondiales, le réseau ferré, fruit du travail de milliers de cheminots a souffert de l’essor de la route. Le développement du réseau routier s’est fait contre le réseau ferré. En dehors du capitalisme, la sauvegarde de cet outil aurait pu se faire, mais au sein du « marché », la concurrence fait le tri entre ce qui est rentable financièrement et ce qui ne l’est pas… Le chemin de fer a alors connu une crise de surproduction endémique du capitalisme, c’est à dire une crise qui empêche un secteur économique de vivre non pas parce qu’il n’est pas utile aux gens, mais parce qu’il n’ya plus face à ce service une demande solvable pour celui-ci.
- Le tout TGV : privatiser les profits, mutualiser les pertes
Après la seconde guerre mondiale les fermetures de ligne continuent pour favoriser l’automobile. Le développement de la vitesse est au coeur des recherches de la SNCF créée en 1938 par la fusion de l’Administration des Chemins de Fer de l’Etat avec les compagnies privées résiduelles. Les records de vitesse se succèdent les recherches se tournent vers la traction électrique pour la création du TGV après la crise pétrolière des années 1970.
La construction de lignes de TGV représente un coût important qui a pour conséquence le délaissement de beaucoup de dessertes secondaires et des express normaux. Cela laisse une politique régionale des transports exangue dans beaucoup de région dans les années 1990.
C’est à partir de ce constat que les gouvernements successifs de droite comme de gauche ont sais ila balle au bond pour engager une restructuration de la SNCF sous couvert de développement des TER.
Les prémices de la libéralisation :
- Un début épique : l’EPIC :
Dès 1983 la SNCF n’est plus une administration de l’Etat elle devient un Etablissement Public Industriel et Commercial (EPIC), censée recevoir des compensations de l’Etat, ce service public sera malgré tout contraint avec ce statut de calquer son fonctionnement sur celui d’une entreprise privée.
- Une décentralibéralisation :
De 1997 à 2002 toutes les régions ont au fur et à mesure contractualisé avec la SNCF le transfert des compétences qui concernent le transport régional de voyageurs. Ainsi depuis 2002, ce sont les conseils régionaux qui organisent les trains régionaux. Cette mesure s’accompagne sous le gouvernement Jospin du découpage de la SNCF en 2 entités : la SNCF en tant que compagnie ferroviaire et RFF (Réseau Ferré de France en tant que propriétaire du réseau qui confie à la SNCF son entretien). C’est le premier découpage de la SNCF avant que celle-ci ne commence à se mutiler à travers différentes filiales.
- Concurrence possible :
La boîte de Pandore est ouverte, les régions étant compétentes pour les trains régionaux, il ne reste plus qu’un mouvement du cadre législatif à réaliser pour qu’elles contractualisent avec d’autres compagnies. Cela est réalisé en 2009, à partir de cette date, les entreprises privées peuvent fare circuler des trains de voyageurs sur le réseau ferré français.
- Les trains de fret avaient montré la voie à ne pas suivre :
Auparavant l’ouverture du fret (transport ferroviaire de marchandises) à la concurrence a été permise dès 2007. Les nombreux trains de marchandises privés (y compris de filiales de la SNCF comme VLFI) circulent désormais avec le train d’incidents qui les accompagnent :
– Les incidents impliquant ECR (Euro Cargo Rail, fililale de la Deutsche Bahn, l’équivalent de la SNCF en Allemagne) : ici, là ou encore…
– Incident impliquant Veolia.
Les exemples se multiplient et ne sont que très rarement relayés dans la presse pour ne pas décrédibiliser le credo capitaliste (exemple d’article existant malgré tout).
Cela effraie quelque peu car ce sont les mêmes compagnies qui nous transporteront dans quelques années. Le Royaume-Uni en a fait l’amère expérience, les nombreux accidents ferroviaires qui ont suivi la privatisation du rail outre-manche a obligé leur gouvernement à remettre la main à la poche pour la sécurité des voyageurs.
- Une privatisation simple comme une étiquette :
Un peu d’attention visuelle sur les TER indique déjà la volonté de pouvoir changer « d’opérateur » très rapidement. En effet, la région occupe une très grande place visuelle sur les trains, mais la SNCF n’a qu’un petit autocollant sur les TER, très facile à changer, ni vu ni connu.
exemple sur ce TER Rhône-Alpes (photographie issue de Wikipedia) :
Lequel, comparé à ce TER Alsace (photographie issue de Wikipedia), permet de voir que passer de l’ancien logo SNCF au nouveau a été aussi facile que ne le sera le passage au visuel d’une autre entreprise.
Cette mutation sera grandement facilitée par le fait que la plupart des rames de TER appartiennent aux conseils régionaux et pas à la SNCF.
La concurrence contre les salaires, pour la précarité, pour les profits :
Dans tous les processus de libéralisation qui se sont produites jusqu’à maintenant (dans l’ordre : eau, telecom, énergies) la concurrence a détruit et précarisé l’emploi, a fait augmenter les prix et les profits des actionnaires…
- Des services déjà privatisés , du salarié suicidaire à l’actionnaire pépère :
Entre :
– le calcul obscur du prix public de l’énergie qui depuis la privatisation d’EDF GDF a fait augmenter le prix de l’énergie d’environ 60%
– le prix du timbre qui depuis la transformation de La Poste en société anonyme va rattraper les tarifs de ses petites amies privées européennes en dépassant les 60 centimes
– l’abonnement téléphonique multiplié par 2 depuis la privatisation de France Telecom et des abonnements haut-débit qui prétextent la suppression d’un avantage fiscal (baisse de TVA) pour augmenter ;
les exemples ne manquent pas pour démontrer que la privatisation d’un monopole public aboutit rapidement à la mise en place d’un oligopole privé qui s’entend sur les prix afin de préserver ses profits.
Les usagers de ses services qui paient le prix fort ne sont pas les seuls victimes, les salariés (quand ils ne se suicident pas… ) paient un lourd tribut à la privatisation de leur entreprise. Ils perdent un statut protecteur qui leur garantit un emploi décent avec un salaire décent et des conditions de travail décentes pour se retrouver en situation parfois précaire, des salaires au rabais à travers la multiplication des emplois au SMIC et des temps partiels.
Les seuls bénéficiaires de ces « réformes » sont les actionnaires, puisque leurs dividendes contrairement aux salaires sont toujours au beau fixe pour la majorité des entreprises concernées.
- Le rail se prépare à y passer :
Le Service Public du rail va connaître sans la mobilisation de ses usagers et des cheminots le même trajet, les régions pourront confier leurs TER à des entreprises comme Veolia (qui à travers les CFTA gèrent déjà des TER en sous-traitance), Air France etc.
La SNCF tirera quand même son épingle du jeu car elle prépare cette étape de longue date, la filialisation des ses activités ne touche pas seulement le fret : Keolis, premier transporteur de voyageurs sur la route et dans les villes est une filiale de la SNCF. Il y’a fort à parier que cette entreprise privée sera la première à décrocher des marchés auprès des régions à l’heure fatidique des appels d’offres. Elle exploite déjà des réseaux de TER en grande-Bretagne (exemple).
- Un processus porté à l’unisson par les partis politique de gouvernement :
Les forces politique majoritaires lors des élections sont complices dans les processus en cours, en effet, N. Sarkozy et L’UMP portent cette libéralisation haut et fort à l’image du sénateur qui à publié ce rapport sur la libéralisation des TER, mais aucun confiance ne peut être faite au Parti Socialiste pour défendre ce Service Public, lecandidat présumé du PS, D. Strauss-Kahn, actuel président du FMI, est le ministre des finances qui a privatisé France Telecom et qui a avec son camarade du PCF J.C. Gayssot découpé la SNCF pour préparer la libéralisation de ce secteur.
Un service public des transports régionaux gratuit sous contrôle des voyageurs :
Les capitalistes libéraux avancent leurs mesures destructrice avec un rythme implacable, pourtant l’urgence sociale et écologique dans laquelle nous vivons nous impose de faire des contre-propositions, il s’agit nécessairement de recourir à la gratuité des transports en commun, assurés par des services 100% publics contrôlés directement par leurs salariés et leurs usagers. C’est la seule possibilité que nous ayons pour que se développe de vraies économies d’énergie en limitant les transports individuels motorisés, ainsi qu’une mobilité accessible à tous. Cela nous protègera de l’appétit des actionnaires. Un tel fonctionnement démocratique nous prémunit également de la sclérose qui touche parfois les grandes administrations. En effet, quand le peuple n’est pas assez vigilant sur le fonctionnement des structures publiques, il ne faut pas nier que des fonctionnements aberrants peuvent apparaitre. (fournissant ainsi des arguments aux néo-libéraux qui utilisent ce prétexte pour décrédibiliser les services publics afin de les découper, puis de les vendre).
Le transport public de voyageur est un service trop sensible pour être confié à l’appétit des actionnaires… Mobilisons-nous !
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